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Quelques éléments d'analyse sur Apple et ses concurrents
Si on regarde l'origine de la valeur ajoutée sur un appareil complexe comme un téléphone portable (mais c'est aussi vrai d'une voiture, d'un avion, etc... ) on trouve :
- le hard (les différents composants)
- le soft
- la valeur ajoutée qu'apporte l'architecte/intégrateur de ces différents éléments (le tout est plus que la somme des parties)
- des revenus complémentaires, tirés de services tournant autour de l'écosystème lié à l'appareil (applications, contenus, services complémentaires (AppleCare, p ex))
Le producteur peut, par choix ou par nécessité, ne s'intéresser qu'à une partie des différentes composantes de cette plus value (en achetant ou non des composants, ou le soft, etc ..), mais il doit de toutes façons assurer son rôle d'architecte/intégrateur, que personne ne peut jouer à sa place. Les constructeurs automobiles, par exemple, achètent pratiquement tous les composants à l'extérieur (sauf peut être le moteur), et se limitent donc pour l'essentiel à un rôle d'intégrateur.
L'exemple de l'IBM PC montre combien il est dangereux de s'en remettre à une tierce partie pour ce qui est du logiciel. D'abord parce que c'est tirer un trait sur une part non négligeable (et souvent notoirement sous estimée) de la plus value, et ensuite parce que c'est se retrouver à la merci d'un partenaire/fournisseur qui va également vendre ce même logiciel aux concurrents, empêchant ainsi toute différentiation à ce niveau, et dont les priorités de développement n'ont aucune raison de coïncider avec les attentes de l'intégrateur. En outre (mais ceci, IBM na même pas survécu suffisamment longtemps sur ce marché pour sen apercevoir), les revenus complémentaires liés à lécosystème sont principalement empochés par celui qui maîtrise le software (lécosystème est en fait moins lié à un produit particulier quà la gamme de produits qui partagent le même logiciel de base).
Le raisonnement est un peu moins vrai pour les composants hardware, car ils sont plus facilement substituables (plusieurs sources existent en général), et également parce que ne pas être en charge des composants libère l'intégrateur des énormes dépenses de R&D qu'il faut faire sur toutes les technologies de base sous-jacentes, sous peine d'être balayé par un concurrent plus innovant. Ces dépenses sont d'autant plus énormes que le succès sur ce type de R&D «*technologique*» est très aléatoire (on peut parfaitement dépenser beaucoup, sans résultat, et se faire doubler par un petit malin (une start up) qui lui a visé dans le mille du premier coup, à peu de frais).
Pour cette raison, beaucoup de grands groupes se contentent de «*faire semblant*» de faire de la recherche, mais ils nen attendent rien, en fait. Ils se contentent de surveiller du coin de loeil les start up innovantes qui empiètent dans leur domaine, et de les racheter au moment où leur prix reste raisonnable.
Dautres, plus rusés encore (je ne citerai pas de noms ) créent un fonds de capital risque, doté de quelques dizaines de millions de Dollars (ce qui nest rien pour un grand groupe). De cette façon, ils nont même pas besoin de faire la moindre activité de veille technologique, les innovateurs en quête de financement leur apportant tout gratuitement à domicile
L'analyse conduisant à décider de faire ou dacheter un composant donné («*make*» or «*buy*») doit cependant être affinée composant par composant : Apple développe ainsi maintenant certains de ses processeurs, de même que Renault a décidé de s'intéresser directement à la batterie de son véhicule électrique, car il s'agit d'un composant clé, représentant (aujourd'hui en tout cas) l'essentiel de la plus value. La situation nest donc jamais binaire
A la lumière de cette petite analyse : il est clair que Nokia se tire une balle dans le pied en s'alliant avec Microsoft. Nokia ne développant pas (à ma connaissance) ses composants, et n'ayant par ailleurs pas su développer comme Apple d'écosystème source de revenus complémentaires, ne peut plus compter que sur son rôle d'intégrateur pour justifier son existence. Mais c'est ainsi faire cadeau à tous ses fournisseurs (dont bien entendu Microsoft, qui compte bien recevoir ce qu'il estime être son dû) de la partie de la plus value correspondante, et d'autre part intégrer harmonieusement des composants hard et soft entre deux sociétés est beaucoup plus difficile qu'au sein d'une même société (sachant que c'est déjà difficile au sein d'une même société, les cultures des «*hardeux*» et des «*softeux*» étant très différentes, les «*softeux*» détestant être dirigés par un «*hardeux*», et vice versa (ce qui est dailleurs beaucoup moins fréquent). L'objection selon laquelle c'est pourtant ce que parviennent à faire tant bien que mal les fabriquants de PC sous Windows n'est à mon avis pas pertinente, car on a affaire avec les portables à des bijoux de technologie, à haut niveau d'intégration, au sens où l'intégrateur doit faire une multitude de choix interdépendants, afin de satisfaire des objectifs très difficiles, et partiellement contradictoires en terme d'encombrement, de poids, d'autonomie, de vitesse de traitement, etc ... qui nécessitent des optimisations fines au niveau du hard ET du soft, auxquelles celui qui se contente dutiliser un logiciel «*en létat*» na pas accès.
NOKIA a complètement raté son introduction sur le marché US, où il est devenu un acteur marginal, avec une image de marque très négative. Lexpérience montre (cf Renault) que ce genre de handicap est presque insurmontable, le consommateur américain étant doté dune très longue mémoire. Dautre part, il est vain de prétendre aux premières marches du podium mondial si lon ne figure pas en bonne place sur le marché US.
Il sera donc intéressant à lavenir de comparer les performances dApple et de Samsung, car chacun a des points forts et des points faibles*: Apple maîtrise le software (et donc, lécosystème, qui pèsera de plus en plus lourd), mais pas les composants (à lexception dune petite partie). Samsung, de son côté, maîtrise lessentiel des composants, mais pas le software.
Samsung est un conglomérat coréen très diversifié, qui pèse 173 Milliards de Dollars de CA pour 270*000 employés, mais dont lactivité essentielle est celle de sa branche Samsung Electronics, qui a pesé à elle seule environ 137 Milliards de Dollars en 2010. Apple de son côté, a un chiffre daffaires en très rapide croissance, qui est estimé à 100 Milliards de Dollars pour 2011, avec seulement 46*000 employés environ*. Cependant, la seule chose qui intéresse un financier, ce sont les profits (c'est peut être réducteur, mais sans profit, pas de R&D, pas de croissance). Samsung Electronics a annoncé pour 2010 un «*operating profit*» de 15 Milliards de Dollars (mais difficile de savoir ce que recouvre exactement ce terme). Curieusement, j'ai eu du mal à trouver des chiffres pour Apple, autres que des «*quarterly profits*», mais si on s'en tient au dernier annoncé (6 Milliards de Dollars, cela fait un profit annuel de 24 Milliards de Dollars (et je pense que ce chiffre sera explosé pour 2011).
Le problème dun acteur ne maîtrisant pas le software est que rien nest plus facile à copier quun design hardware (il suffit douvrir un appareil concurrent, et de le copier). IBM se croyait ainsi bien protégé par ses brevets, et n'avait pas imaginé que des concurrents cloneraient son PC
A ce petit jeu, les chinois sont les maîtres (et ils pourront parfaitement je pense, pour gagner du temps, racheter Nokia pour une bouchée de pain dans un avenir proche). Un «*pure player*» hardware, sauf à entretenir un rythme dinnovation dantesque, voit ses marges sécrouler rapidement, en même temps que se développe le phénomène de copie.
Microsoft a démontré (à la surprise générale, à lépoque), la viabilité dun modèle «*pure player*» software*. Cependant , ce succès est beaucoup du à la roublardise de Bill Gates, qui a su parfaitement tirer parti de la naïveté de ses interlocuteurs de lépoque (cela dit, quand je vois ce que fait Nokia, on peut se dire que cette naïveté reste un filon parfaitement exploitable). Le problème de Microsoft est davoir essayé de jongler avec les attentes contradictoires du marché professionnel dune part, qui hait linnovation (car elle rend le parc matériel obsolète), et du marché grand public, dautre part, sur lequel par contre linnovation peut seule entretenir lappétit du consommateur.
Cas particulier des «*pure players*» software (ou «*quasi*» pure players ) (Microsoft, Google, etc*..).
Limportance du logiciel dans le produit final , ainsi que leur capacité, beaucoup plus forte que dans le cas du hard, à préserver leur marge, leur donne de nombreux atouts. Ils sont dautre part naturellement protégés de larrivée de nouveaux entrants par le simple fait quil ny a de place sur le marché que pour un nombre limité de ce type dacteurs, la fragmentation des OS conduisant les développeurs dapplications à ne retenir que les plateformes dominantes (la remontée de lOS Apple, dans ce contexte, apparaît comme une performance stupéfiante, vu lécrasante domination du monde Windows).
Cependant, Microsoft sétant laissé distancer sur les portables, seul Apple est aujourdhui en mesure de proposer (avec la convergence prévisible OS X / iOS) un logiciel de base harmonisé entre les machines de bureau/portables et les appareils mobiles (tablettes et Smartphones). Ceci donne/donnera à mon avis un avantage décisif à Apple dans la guerre des OS .
Si on regarde l'origine de la valeur ajoutée sur un appareil complexe comme un téléphone portable (mais c'est aussi vrai d'une voiture, d'un avion, etc... ) on trouve :
- le hard (les différents composants)
- le soft
- la valeur ajoutée qu'apporte l'architecte/intégrateur de ces différents éléments (le tout est plus que la somme des parties)
- des revenus complémentaires, tirés de services tournant autour de l'écosystème lié à l'appareil (applications, contenus, services complémentaires (AppleCare, p ex))
Le producteur peut, par choix ou par nécessité, ne s'intéresser qu'à une partie des différentes composantes de cette plus value (en achetant ou non des composants, ou le soft, etc ..), mais il doit de toutes façons assurer son rôle d'architecte/intégrateur, que personne ne peut jouer à sa place. Les constructeurs automobiles, par exemple, achètent pratiquement tous les composants à l'extérieur (sauf peut être le moteur), et se limitent donc pour l'essentiel à un rôle d'intégrateur.
L'exemple de l'IBM PC montre combien il est dangereux de s'en remettre à une tierce partie pour ce qui est du logiciel. D'abord parce que c'est tirer un trait sur une part non négligeable (et souvent notoirement sous estimée) de la plus value, et ensuite parce que c'est se retrouver à la merci d'un partenaire/fournisseur qui va également vendre ce même logiciel aux concurrents, empêchant ainsi toute différentiation à ce niveau, et dont les priorités de développement n'ont aucune raison de coïncider avec les attentes de l'intégrateur. En outre (mais ceci, IBM na même pas survécu suffisamment longtemps sur ce marché pour sen apercevoir), les revenus complémentaires liés à lécosystème sont principalement empochés par celui qui maîtrise le software (lécosystème est en fait moins lié à un produit particulier quà la gamme de produits qui partagent le même logiciel de base).
Le raisonnement est un peu moins vrai pour les composants hardware, car ils sont plus facilement substituables (plusieurs sources existent en général), et également parce que ne pas être en charge des composants libère l'intégrateur des énormes dépenses de R&D qu'il faut faire sur toutes les technologies de base sous-jacentes, sous peine d'être balayé par un concurrent plus innovant. Ces dépenses sont d'autant plus énormes que le succès sur ce type de R&D «*technologique*» est très aléatoire (on peut parfaitement dépenser beaucoup, sans résultat, et se faire doubler par un petit malin (une start up) qui lui a visé dans le mille du premier coup, à peu de frais).
Pour cette raison, beaucoup de grands groupes se contentent de «*faire semblant*» de faire de la recherche, mais ils nen attendent rien, en fait. Ils se contentent de surveiller du coin de loeil les start up innovantes qui empiètent dans leur domaine, et de les racheter au moment où leur prix reste raisonnable.
Dautres, plus rusés encore (je ne citerai pas de noms ) créent un fonds de capital risque, doté de quelques dizaines de millions de Dollars (ce qui nest rien pour un grand groupe). De cette façon, ils nont même pas besoin de faire la moindre activité de veille technologique, les innovateurs en quête de financement leur apportant tout gratuitement à domicile
L'analyse conduisant à décider de faire ou dacheter un composant donné («*make*» or «*buy*») doit cependant être affinée composant par composant : Apple développe ainsi maintenant certains de ses processeurs, de même que Renault a décidé de s'intéresser directement à la batterie de son véhicule électrique, car il s'agit d'un composant clé, représentant (aujourd'hui en tout cas) l'essentiel de la plus value. La situation nest donc jamais binaire
A la lumière de cette petite analyse : il est clair que Nokia se tire une balle dans le pied en s'alliant avec Microsoft. Nokia ne développant pas (à ma connaissance) ses composants, et n'ayant par ailleurs pas su développer comme Apple d'écosystème source de revenus complémentaires, ne peut plus compter que sur son rôle d'intégrateur pour justifier son existence. Mais c'est ainsi faire cadeau à tous ses fournisseurs (dont bien entendu Microsoft, qui compte bien recevoir ce qu'il estime être son dû) de la partie de la plus value correspondante, et d'autre part intégrer harmonieusement des composants hard et soft entre deux sociétés est beaucoup plus difficile qu'au sein d'une même société (sachant que c'est déjà difficile au sein d'une même société, les cultures des «*hardeux*» et des «*softeux*» étant très différentes, les «*softeux*» détestant être dirigés par un «*hardeux*», et vice versa (ce qui est dailleurs beaucoup moins fréquent). L'objection selon laquelle c'est pourtant ce que parviennent à faire tant bien que mal les fabriquants de PC sous Windows n'est à mon avis pas pertinente, car on a affaire avec les portables à des bijoux de technologie, à haut niveau d'intégration, au sens où l'intégrateur doit faire une multitude de choix interdépendants, afin de satisfaire des objectifs très difficiles, et partiellement contradictoires en terme d'encombrement, de poids, d'autonomie, de vitesse de traitement, etc ... qui nécessitent des optimisations fines au niveau du hard ET du soft, auxquelles celui qui se contente dutiliser un logiciel «*en létat*» na pas accès.
NOKIA a complètement raté son introduction sur le marché US, où il est devenu un acteur marginal, avec une image de marque très négative. Lexpérience montre (cf Renault) que ce genre de handicap est presque insurmontable, le consommateur américain étant doté dune très longue mémoire. Dautre part, il est vain de prétendre aux premières marches du podium mondial si lon ne figure pas en bonne place sur le marché US.
Il sera donc intéressant à lavenir de comparer les performances dApple et de Samsung, car chacun a des points forts et des points faibles*: Apple maîtrise le software (et donc, lécosystème, qui pèsera de plus en plus lourd), mais pas les composants (à lexception dune petite partie). Samsung, de son côté, maîtrise lessentiel des composants, mais pas le software.
Samsung est un conglomérat coréen très diversifié, qui pèse 173 Milliards de Dollars de CA pour 270*000 employés, mais dont lactivité essentielle est celle de sa branche Samsung Electronics, qui a pesé à elle seule environ 137 Milliards de Dollars en 2010. Apple de son côté, a un chiffre daffaires en très rapide croissance, qui est estimé à 100 Milliards de Dollars pour 2011, avec seulement 46*000 employés environ*. Cependant, la seule chose qui intéresse un financier, ce sont les profits (c'est peut être réducteur, mais sans profit, pas de R&D, pas de croissance). Samsung Electronics a annoncé pour 2010 un «*operating profit*» de 15 Milliards de Dollars (mais difficile de savoir ce que recouvre exactement ce terme). Curieusement, j'ai eu du mal à trouver des chiffres pour Apple, autres que des «*quarterly profits*», mais si on s'en tient au dernier annoncé (6 Milliards de Dollars, cela fait un profit annuel de 24 Milliards de Dollars (et je pense que ce chiffre sera explosé pour 2011).
Le problème dun acteur ne maîtrisant pas le software est que rien nest plus facile à copier quun design hardware (il suffit douvrir un appareil concurrent, et de le copier). IBM se croyait ainsi bien protégé par ses brevets, et n'avait pas imaginé que des concurrents cloneraient son PC
A ce petit jeu, les chinois sont les maîtres (et ils pourront parfaitement je pense, pour gagner du temps, racheter Nokia pour une bouchée de pain dans un avenir proche). Un «*pure player*» hardware, sauf à entretenir un rythme dinnovation dantesque, voit ses marges sécrouler rapidement, en même temps que se développe le phénomène de copie.
Microsoft a démontré (à la surprise générale, à lépoque), la viabilité dun modèle «*pure player*» software*. Cependant , ce succès est beaucoup du à la roublardise de Bill Gates, qui a su parfaitement tirer parti de la naïveté de ses interlocuteurs de lépoque (cela dit, quand je vois ce que fait Nokia, on peut se dire que cette naïveté reste un filon parfaitement exploitable). Le problème de Microsoft est davoir essayé de jongler avec les attentes contradictoires du marché professionnel dune part, qui hait linnovation (car elle rend le parc matériel obsolète), et du marché grand public, dautre part, sur lequel par contre linnovation peut seule entretenir lappétit du consommateur.
Cas particulier des «*pure players*» software (ou «*quasi*» pure players ) (Microsoft, Google, etc*..).
Limportance du logiciel dans le produit final , ainsi que leur capacité, beaucoup plus forte que dans le cas du hard, à préserver leur marge, leur donne de nombreux atouts. Ils sont dautre part naturellement protégés de larrivée de nouveaux entrants par le simple fait quil ny a de place sur le marché que pour un nombre limité de ce type dacteurs, la fragmentation des OS conduisant les développeurs dapplications à ne retenir que les plateformes dominantes (la remontée de lOS Apple, dans ce contexte, apparaît comme une performance stupéfiante, vu lécrasante domination du monde Windows).
Cependant, Microsoft sétant laissé distancer sur les portables, seul Apple est aujourdhui en mesure de proposer (avec la convergence prévisible OS X / iOS) un logiciel de base harmonisé entre les machines de bureau/portables et les appareils mobiles (tablettes et Smartphones). Ceci donne/donnera à mon avis un avantage décisif à Apple dans la guerre des OS .