J'ai un ami qui s'appelle Gildas. Je le connais peu, mais je l'aime bien. C'est un ami en ce sens. Mais je le connais peu. Je ne sais même pas comment on prononce son nom, en fait.
On dit Gildasse, comme une tignasse ?
Ou on dit Gilda, comme si on gobait le "s" ?
J'en sais rien.
Je lui demanderais bien, mais j'ose pas.
Il est susceptible, Gildas. Une ou deux fois, j'ai déconné sur des trucs qui lui tenaient à c½ur, ça lui a pas plu. Oh putain ! J'ai vu que ça rigolait pas. Il dégaine à une de ces vitesses, ça fuse !
C'est un fighter, aussi, faut dire. Un gamer, quoi.
Je connais pas trop de gamers, en fait. J'ai des potes qui font joujou un peu, mais comme ils savent que je m'en cogne royalement, ils m'en parlent pas trop.
J'ai joué, faut pas croire, hein ! Super longtemps ! Mais pas sur mes bécanes.
Bon, bref.
Gildas, je le voie un peu comme ça. Un joueur, genre un chevalier.
C'est breton, Gildas, vous le saviez ?
Ça lui va bien, Gildas, comme prénom.
Il est breton. Mon ami. Comme son prénom. Bon, le Gildas qu'a été canonisé, c'était pas un drôle. Plutôt du genre moine chieur.
J'ai lu des trucs, sur lui, putain, il rigolait pas, le Gildas. Le sage, on l'appelait. Gildas le Sage. The Wize. Parce qu'il est celte, hein, il est pas breton. Irlandais, si vous voulez tout savoir. Ça vient de Gwelt. Ça veut dire chevelure. Enfin, tignasse. C'est ce qui me fait dire qu'on dit Gildasse.
Ceci dit, Gildasse, écrit comme ça, ça existe aussi. Donc si y'a les deux, c'est qu'on doit dire Gilda. D'ailleurs, au féminin, on dit Gilda.
Ah oui, parce que je vous l'ai pas dit, mais c'est un prénom mixte, Gildas. Ça fait aussi bien fille que garçon. C'est pas pratique pour l'affirmation de la sexuation quand t'es ado, mais c'est comme ça.
Si en plus d'être breton, t'as une sacré tignasse, on te prend pour une gonzesse rapide. Et là-bas, ils sont pas homophobes, mais tout comme, comme disait mon oncle. Paix à son âme. Le cairn fier. Chez moi on dit un cairn. Chez Gildas on dit un kern. C'est quasi pareil. Sauf que les kern, ils peuvent être un peu cimentés tandis que les cairns non, et que les cairns, ils sont tous géodésiques, tandis que les kern, non. Faut dire que y'a pas beaucoup de montagnes très hautes, en Armorique, donc indiquer l'altitude, c'est pas vital, non plus.
Le Saint Gildas en question, il dénonçait l'oppression des peuples et tout ça. Et il en appelait à la fierté nationale britonne, aussi. Genre à dénoncer les corrompus, vous voyez ? Il a écrit un bouquin. Un pamphlet contre la royauté. De Excidio Britanniae. En résumé, ça fait "regardez comme ma patrie meurt, depuis que le roi corrompu a vendu les royaumes du Nord, les terres de mes frères, à ces sales saxons impies honnis de Dieu et des hommes". Ah il y va pas de main morte avec le dos de la cuillère à sucre. Comme il les cassent !
Bon, et comme il est super connu, qu'on l'appelle Gildas le sage, qu'il est super respecté et tout, le Roi il lui dit rien, il lui dit juste : "Bon, tu me les casses, Gildas, alors file où j'vais t'donner d'l'élan".
Du coup, Gildasse, il se casse, et le voila dans l'Armorique. Peinard. Genre vers le début du 6° siècle.
A cette époque-là, y'avait pas des masses de restos où tu pouvais bouffer une araignée-mayonnaise un dimanche à 3 heures de l'aprèm, moi je vous le dit.
Le reste, j'ai pas tout compris, il a aussi écrit une doctrine des latrines émérites, où il s'insurge contre les gyrovagues. Alors je sais pas si il s'insurge contre les gyrophares, comme s'il dénonçait les violences policières. Ou alors les sirènes des flics de l'époque qui l'empêchaient de ronquer (parce qu'une fois qu'il a été en Bretagne, il en a plus branlé une, pas besoin de vous faire un dessin), ou alors qu'il était contre les surfeurs qui faisaient des tourbillons. Je sais pas. Anti-flic, antisocial ou anti-djeunes, je sais pas.
En tout cas, ce Gildas qui aimait pas les moines maraudeurs, c'est un des patrons de la région de Vannes.
L'Abbaye Saint Gildas de Rhuys.
Pas Saint-Gildas-des-bois près de Nantes, hein, Saint-Gildas-de-Rhuys. C'est de là que ça vient.
L'abbaye est toute belle, non ? Et pourtant, elle est même pas classée Monument Historique. Pas assez originale. Pourtant elle est vieille. Première nef construite vers 536, église actuelle reconstruite à la charnière du XI° et du XII° siecle. Mélange d'époques. C'était bien proportionné, mais pas très folichon, à cette heure-là. Abbaye des Bénédictins de la congrégation de Saint-Maur, aujourd'hui Abbaye des S½urs de la charité de Saint-louis, l'Abbaye de Saint-Gildas de Rhuys est toujours habitée par les curés.
Des curettes, en l'occurrence.
Je connais pas le coin, hein, mais je l'imagine bien.
Le bled, Saint-Gildas-de-Rhuys, a fait l'objet d'une publication et d'un inventaire complet des services de.... l'inventaire, justement. Dans la base Mérimée, la base unifiée des monuments historiques français, y'a pas moins de 37 "éléments immobiliers" (des bâtiments, des maisons, des portes, des croix, des dolmens, des éléments de façade), 96 "objets mobiliers" (des statues, des tableaux, des ornements, des dalles funéraires, essentiellement des trucs religieux), et pour aller avec tout ça, une bonne trentaine d'illustrations des richesses patrimoniales de ce charmant bled breton. Dont une très correcte photo NB encapsulée dans 65 kilos de jipeg, de, je vous le donne Émile, des nonnes de la charité de l'autre cinglé qui se baladent sur la plage. Ben voyons.
Ça doit être catho, là-bas, je vous raconte pas. Je connais pas, hein, j'y ai jamais mis les pieds. Mais entre les photos, les notices d'objets ou de bâtiments, et tout le reste des trucs produits par l'Inventaire, on se fait facile une idée de ce à quoi ça ressemble. Des falaises meurtrières en granit déchiré. De la verdure everywhere. 1431 âmes, à ce que dit le recensement de 1999. Un peu plus aujourd'hui, vu le taux de croissance de la décennie nonante.
Il doit y avoir quelque chose comme une quinzaine de croix recensées. Des monumentales, des remarquables par leur façon, ou l'artiste qui l'a exécutée, ou un motif original. Sans compter les croix de cimetière. Une bonne dizaine aussi, avec les dalles funéraires. Trois ou quatre églises, en sus de l'abbaye qui nous occupe. Charming.
Et des bénédictines qui se baladent sur la plage.
Nues sous leur habit, qui sait? Peut-être qu'y a des mignonnes, roses et gaies. Et des vieilles morues pour t'empêcher de t'en approcher, des fois que t'aurais des folies dans la tête. Etre ado là-bas, ça doit payer !
T'es pas loin de Vannes. T'es à la campagne. T'as tes potes, ils ont des bécanes aussi, comme toi. Tu vas au bord des falaises, tu dragues les gonzesses. Ou alors y'en a pas ce jour-là, t'es juste avec les potes et tu mates les nonnes qui passent. Et tu déconnes.
"Ah ouais, putain, l'autre, regarde, la troisième, là, ah, je me la r'trousserais bien contre la falaise"
T'es content. T'es tout empourpré. Y'a l'air marin qui te fouette, l'iode qui te saoule.
Bon, je dis ça, mais mon ami Gildas au sujet duquel je me pose des questions de prononciation, je sais pas de quel coin il est en Bretagne. Enfin, j'ai su, mais j'en ai plus la souvenance.
Et je connais pas son adolescence non plus. Je le connais pas assez pour ça.
A Saint-Gildas-de-Rhuys, y'a pas que des trucs chrétiens, y'a aussi des plans néolithiques pas mal, visiblement. Des dolmens, une allée couverte. Y'a des gens qui vivent là-bas depuis des lustres. Dans la dévotion.
Dans le néolithique, ils ont du en chier, mais après J.C. (Jules césar, pas l'autre, hein), y'a une une période peinarde, visiblement. Vu le trésor amassé.
Pas trop emmerdés par les grands-bretons, ils étaient tous grands-bretons à un degré ou à un autre. La seule grande différence, c'était la dévotion. Ils étaient complètement allumés. On sait pas trop pourquoi. Peut-être à force de se prendre le soleil couchant tout rouge dans la vue. On sait pas, c'est un mystère scientifique, mais toujours est-il qu'ils étaient tous à grenouiller dans les bénitiers.
Mon pote Gildas, il a les cheveux courts. C'est le seul Gildas que j'connaisse, en fait. Vous en connaissez, vous, des Gildas ? Si je le connaissais mieux, je me poserais pas cette question.
Si vous en connaissez, ça vous ennuierait pas trop de leur demander ?
Si on le prononce, ce put... de
On dit Gildasse, comme une tignasse ?
Ou on dit Gilda, comme si on gobait le "s" ?
J'en sais rien.
Je lui demanderais bien, mais j'ose pas.
Il est susceptible, Gildas. Une ou deux fois, j'ai déconné sur des trucs qui lui tenaient à c½ur, ça lui a pas plu. Oh putain ! J'ai vu que ça rigolait pas. Il dégaine à une de ces vitesses, ça fuse !
C'est un fighter, aussi, faut dire. Un gamer, quoi.
Je connais pas trop de gamers, en fait. J'ai des potes qui font joujou un peu, mais comme ils savent que je m'en cogne royalement, ils m'en parlent pas trop.
J'ai joué, faut pas croire, hein ! Super longtemps ! Mais pas sur mes bécanes.
Bon, bref.
Gildas, je le voie un peu comme ça. Un joueur, genre un chevalier.
C'est breton, Gildas, vous le saviez ?
Ça lui va bien, Gildas, comme prénom.
Il est breton. Mon ami. Comme son prénom. Bon, le Gildas qu'a été canonisé, c'était pas un drôle. Plutôt du genre moine chieur.
J'ai lu des trucs, sur lui, putain, il rigolait pas, le Gildas. Le sage, on l'appelait. Gildas le Sage. The Wize. Parce qu'il est celte, hein, il est pas breton. Irlandais, si vous voulez tout savoir. Ça vient de Gwelt. Ça veut dire chevelure. Enfin, tignasse. C'est ce qui me fait dire qu'on dit Gildasse.
Ceci dit, Gildasse, écrit comme ça, ça existe aussi. Donc si y'a les deux, c'est qu'on doit dire Gilda. D'ailleurs, au féminin, on dit Gilda.
Ah oui, parce que je vous l'ai pas dit, mais c'est un prénom mixte, Gildas. Ça fait aussi bien fille que garçon. C'est pas pratique pour l'affirmation de la sexuation quand t'es ado, mais c'est comme ça.
Si en plus d'être breton, t'as une sacré tignasse, on te prend pour une gonzesse rapide. Et là-bas, ils sont pas homophobes, mais tout comme, comme disait mon oncle. Paix à son âme. Le cairn fier. Chez moi on dit un cairn. Chez Gildas on dit un kern. C'est quasi pareil. Sauf que les kern, ils peuvent être un peu cimentés tandis que les cairns non, et que les cairns, ils sont tous géodésiques, tandis que les kern, non. Faut dire que y'a pas beaucoup de montagnes très hautes, en Armorique, donc indiquer l'altitude, c'est pas vital, non plus.
Le Saint Gildas en question, il dénonçait l'oppression des peuples et tout ça. Et il en appelait à la fierté nationale britonne, aussi. Genre à dénoncer les corrompus, vous voyez ? Il a écrit un bouquin. Un pamphlet contre la royauté. De Excidio Britanniae. En résumé, ça fait "regardez comme ma patrie meurt, depuis que le roi corrompu a vendu les royaumes du Nord, les terres de mes frères, à ces sales saxons impies honnis de Dieu et des hommes". Ah il y va pas de main morte avec le dos de la cuillère à sucre. Comme il les cassent !
Bon, et comme il est super connu, qu'on l'appelle Gildas le sage, qu'il est super respecté et tout, le Roi il lui dit rien, il lui dit juste : "Bon, tu me les casses, Gildas, alors file où j'vais t'donner d'l'élan".
Du coup, Gildasse, il se casse, et le voila dans l'Armorique. Peinard. Genre vers le début du 6° siècle.
A cette époque-là, y'avait pas des masses de restos où tu pouvais bouffer une araignée-mayonnaise un dimanche à 3 heures de l'aprèm, moi je vous le dit.
Le reste, j'ai pas tout compris, il a aussi écrit une doctrine des latrines émérites, où il s'insurge contre les gyrovagues. Alors je sais pas si il s'insurge contre les gyrophares, comme s'il dénonçait les violences policières. Ou alors les sirènes des flics de l'époque qui l'empêchaient de ronquer (parce qu'une fois qu'il a été en Bretagne, il en a plus branlé une, pas besoin de vous faire un dessin), ou alors qu'il était contre les surfeurs qui faisaient des tourbillons. Je sais pas. Anti-flic, antisocial ou anti-djeunes, je sais pas.
En tout cas, ce Gildas qui aimait pas les moines maraudeurs, c'est un des patrons de la région de Vannes.
L'Abbaye Saint Gildas de Rhuys.
Pas Saint-Gildas-des-bois près de Nantes, hein, Saint-Gildas-de-Rhuys. C'est de là que ça vient.
L'abbaye est toute belle, non ? Et pourtant, elle est même pas classée Monument Historique. Pas assez originale. Pourtant elle est vieille. Première nef construite vers 536, église actuelle reconstruite à la charnière du XI° et du XII° siecle. Mélange d'époques. C'était bien proportionné, mais pas très folichon, à cette heure-là. Abbaye des Bénédictins de la congrégation de Saint-Maur, aujourd'hui Abbaye des S½urs de la charité de Saint-louis, l'Abbaye de Saint-Gildas de Rhuys est toujours habitée par les curés.
Des curettes, en l'occurrence.
Je connais pas le coin, hein, mais je l'imagine bien.
Le bled, Saint-Gildas-de-Rhuys, a fait l'objet d'une publication et d'un inventaire complet des services de.... l'inventaire, justement. Dans la base Mérimée, la base unifiée des monuments historiques français, y'a pas moins de 37 "éléments immobiliers" (des bâtiments, des maisons, des portes, des croix, des dolmens, des éléments de façade), 96 "objets mobiliers" (des statues, des tableaux, des ornements, des dalles funéraires, essentiellement des trucs religieux), et pour aller avec tout ça, une bonne trentaine d'illustrations des richesses patrimoniales de ce charmant bled breton. Dont une très correcte photo NB encapsulée dans 65 kilos de jipeg, de, je vous le donne Émile, des nonnes de la charité de l'autre cinglé qui se baladent sur la plage. Ben voyons.
Ça doit être catho, là-bas, je vous raconte pas. Je connais pas, hein, j'y ai jamais mis les pieds. Mais entre les photos, les notices d'objets ou de bâtiments, et tout le reste des trucs produits par l'Inventaire, on se fait facile une idée de ce à quoi ça ressemble. Des falaises meurtrières en granit déchiré. De la verdure everywhere. 1431 âmes, à ce que dit le recensement de 1999. Un peu plus aujourd'hui, vu le taux de croissance de la décennie nonante.
Il doit y avoir quelque chose comme une quinzaine de croix recensées. Des monumentales, des remarquables par leur façon, ou l'artiste qui l'a exécutée, ou un motif original. Sans compter les croix de cimetière. Une bonne dizaine aussi, avec les dalles funéraires. Trois ou quatre églises, en sus de l'abbaye qui nous occupe. Charming.
Et des bénédictines qui se baladent sur la plage.
Nues sous leur habit, qui sait? Peut-être qu'y a des mignonnes, roses et gaies. Et des vieilles morues pour t'empêcher de t'en approcher, des fois que t'aurais des folies dans la tête. Etre ado là-bas, ça doit payer !
T'es pas loin de Vannes. T'es à la campagne. T'as tes potes, ils ont des bécanes aussi, comme toi. Tu vas au bord des falaises, tu dragues les gonzesses. Ou alors y'en a pas ce jour-là, t'es juste avec les potes et tu mates les nonnes qui passent. Et tu déconnes.
"Ah ouais, putain, l'autre, regarde, la troisième, là, ah, je me la r'trousserais bien contre la falaise"
T'es content. T'es tout empourpré. Y'a l'air marin qui te fouette, l'iode qui te saoule.
Bon, je dis ça, mais mon ami Gildas au sujet duquel je me pose des questions de prononciation, je sais pas de quel coin il est en Bretagne. Enfin, j'ai su, mais j'en ai plus la souvenance.
Et je connais pas son adolescence non plus. Je le connais pas assez pour ça.
A Saint-Gildas-de-Rhuys, y'a pas que des trucs chrétiens, y'a aussi des plans néolithiques pas mal, visiblement. Des dolmens, une allée couverte. Y'a des gens qui vivent là-bas depuis des lustres. Dans la dévotion.
Dans le néolithique, ils ont du en chier, mais après J.C. (Jules césar, pas l'autre, hein), y'a une une période peinarde, visiblement. Vu le trésor amassé.
Pas trop emmerdés par les grands-bretons, ils étaient tous grands-bretons à un degré ou à un autre. La seule grande différence, c'était la dévotion. Ils étaient complètement allumés. On sait pas trop pourquoi. Peut-être à force de se prendre le soleil couchant tout rouge dans la vue. On sait pas, c'est un mystère scientifique, mais toujours est-il qu'ils étaient tous à grenouiller dans les bénitiers.
Mon pote Gildas, il a les cheveux courts. C'est le seul Gildas que j'connaisse, en fait. Vous en connaissez, vous, des Gildas ? Si je le connaissais mieux, je me poserais pas cette question.
Si vous en connaissez, ça vous ennuierait pas trop de leur demander ?
Si on le prononce, ce put... de