Mère Nature est sans pitié !
Que ce soit un mulot dépouillant l’isolant chèrement payé que l’on s’apprêtait à poser ou ce qui va suivre, Mère Nature est vraiment sans pitié !
Figurez-vous que ce lundi, au matin, j’étais on ne peut plus pressé. Suite à une erreur de calcul, je devais commander au plus vite une fourniture afin d’achever ce que j’avais commencé. Et dans ces cas là, vous pouvez être sûr que tous les animaux de la maison se passent le mot pour me mettre des bâtons dans les roues.
Médor scrutait chacun de mes mouvements avec son regard de merlan frit comme pour me signifier qu’il était temps de sortir. Et Choupette faisait les cents pas devant la baie vitrée avec son rejeton comme pour me faire comprendre qu’elle voulait lui faire découvrir la terrasse – pas la notre hein, la mienne !
Devant la pression canine et féline et pressé par mon besoin, j’ai fini par craquer. Les chats foutus dehors, j’ai pris la route avec Médor. Focalisé sur mon besoin, je n’ai pas réalisé ce qu’il allait se tramer…
« Dans la nature, les chats et plus particulièrement les femelles allaitantes testent l’instinct de survie de leurs portées lorsque les petits sont en âge de se déplacer. »
Si bien que la veille de son premier mois d’existence, le petit Jumbo unique chaton de cette portée, croyait profiter du soleil sous le regard bienveillant de sa mère. Sauf que celle-ci avait un autre objectif pour sa première sortie. Le perdre à quelques mètres de son nid douillet, y revenir et attendre le retour du fils prodige.
Ma précédente femelle, élevée à la dure, avait l’habitude de pratiquer ce que j’appelle « le stage commando ». Mais la Choupette, élevée dans la soie, n’a que l’instinct de cette pratique. Elle est encore incapable de la mettre en œuvre comme il se doit.
Pour tout vous dire, c’est une assistée ! Il lui a fallu plusieurs mises bas pour qu’elle retrouve la gestuelle ancestrale. Et encore, elle doit encore être accompagnée lors de cette phase décisive afin que la mise au monde se passe correctement. Sinon, vous savez quoi, la mortalité exploserait !
Si bien qu’au retour de balade, je vous le donne en mille, la terrasse était vide… Choupette et Jumbo avaient disparu ! Et j’avais beau appeler, personne ne répondait ni ne revenait. Autant vous dire que j’étais dépité !
Et puis d’un coup Madame est revenue, seule. L’air de rien elle s’est affalée sur la terrasse. Alors que ma précédente femelle lançait des miaulements pour aiguiller sa portée, aucun son ne sortait de ma petite assistée. Pire, elle s’endormait !
J’avais beau lui causer, l’inciter à me montrer la direction de l’endroit où elle avait largué « mon bébé », cette folle ne pensait qu’à rentrer dans la maison. Sauf que non, il était hors de question qu’elle retrouve ses pénates seule. Elle passa donc l’après-midi et la nuit dehors.
Mardi matin, après avoir passé une nuit agitée, je ne voyais toujours pas de chaton. La choupette était toujours seule, vautrée sur la terrasse et tout aussi silencieuse que la veille. L’inquiétude continuait de m’envahir. La nuit avait été particulièrement fraîche par rapport aux jours passés. Les idées noires se bousculaient dans mon esprit. Pensez donc, les dangers urbains sont légion pour un chaton à peine éveillé et pas encore habitué aux risques de la vie en extérieur.
Midi passa. Toujours rien ! Le silence de la mère comme du petit continuait de plomber la maison. J’étais désemparé. Ma boule au ventre ne cessait de gonfler. La situation devenait insupportable. Décidément, Mère Nature était sans pitié !
Et puis dans l’après-midi, alors que je faisais une bricole au jardin, un cri strident brisa le silence du quartier. Repérant qu’il s’agissait bien d’un miaulement de chaton, je me mettais en quête de l’emplacement du camping sauvage choisi par sa folle de mère.
Il me fallu deux bonnes minutes pour repérer le jardin d’où provenait ces appels à l’aide. Une fois repéré, l’empressement de retrouver ce petit être vivant faisant, c’est en enjambant la clôture du voisin que j’ai volé à son secours. Au son de ma voix Jumbo bondissait parmi les herbes folles pour me rejoindre. Ce stage commando l’avait aguerri ! Mais il n’avait qu’une envie… Et moi aussi… Retrouver le calme et la douceur du foyer.
Depuis, chaque fois que la baie vitrée s’ouvre ou est ouverte devant lui, il fait demi-tour et file se réfugier sous sa couverture ! Hé hé ! Sa folle de mère a réussi à en faire un vrai chaton d’intérieur !
:ouf: