Tu n'as pas tord.
Mais là, c'était une question de vie ou de mort.
De plus cette première greffe a été l'aboutissement de travaux de recherche considérables en amont, avec en particulier de multiples greffes chez l'animal.
On en est très loin ici.
Et puis, pour cette première greffe cardiaque, on n'était certain de rien, mais à la vue des résultats chez le cochon, on avait de grandes chance de succès. Et puis c'était "l'aventure", sans points de comparaison chez l'homme.
En plus greffer un cœur, chirurgicalement, sur le plan technique, c'est bien plus facile que de greffer un membre (c'est l'anesthésie et la circulation extra-corporelle qui posait le plus de problèmes techniques, finalement).
Là, pour les jambes, quid des essais chez l'animal ?
Quid de la prise en compte des échecs retentissants de greffes de membres (avant bras) antérieur ?
Quid de la prise en compte bénéfices/risque.? Un membre greffé, même si ça "tient" reste peu fonctionnel, beaucoup moins que des prothèses high tech, avec lesquelles tu sais qu'on fait des miracles. Et sur le plan esthétique, crois moi, c'est pas beau, un membre greffé, donc même pas de gain de ce côté là.
Franchement, l'échec était couru d'avance, et je suis quasi certain que l'équipe le savait, et que ce pauvre type a servi de cobaye.
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Ce qui m'inquiète surtout c'est le" respect du protocole". J'espère tout de même qu'ils ont laissé le choix au gars.
Ces histoires de protocoles, c'est d'une connerie.
C'est pour ça que je ne refoutrais plus les pieds dans des urgences de l'hôpital public (oui, j'ai honte, c'est vrai). Ras-le-cul de leur application débile et inhumaine du protocole.
Les protocoles, pour certain trucs, c'est quand même bien pratique, et ça permet de déléguer pas mal de choses, et de libérer du temps médical.
C'est aussi en général un gain considérable pour le patient en terme de sécurité.
Maintenant, je te rejoins sur un point : on entre vraiment dans un délire de protocolisation où tout doit l'être. Aux bon médecins un peu expérimentés de faire la part des choses, de ne pas céder à la généralisation de cette mode, et de se rappeler que chaque patient est est différent.
Et que la médecine reste un artisanat.
Un artisanat d'art et high tech, mais un artisanat quand même. C'est d'ailleurs la beauté du métier. Appliquer des protocoles toute la journée (tu n'as pas tord, c'est particulièrement délirant aux urgences), quel intérêt ? Qu'elle progression ? Qu'est-ce qui te rendra meilleur et plus expérimenté ?
C'est pour ça que j'adore l'addictologie. Certes il y faut des protocole, pour le sevrage, la mise en place des traitements de substitution.
Pour le reste c'est de l'humain, on mouille la chemise, mais quel bonheur cette relation d'une rare intensité, d'un rare enrichissement, d'une rate intimité avec les patients.
Alors bien sûr, faut aimer les gens, et laisser la technique là où elle doit rester.
Je crois que de ce point de vue, on a beaucoup de points commun avec les enseignants, en tout cas si je réfère à mon père qui était un de ces professeurs passionné, fou de son métier.
Le plaisir de soigner, c'est comme le plaisir d'enseigner, ça se protocolise pas.
Quant à laisser le choix au gars, bien sûr, ça a était fait. On l'a sûrement sur-informé, d'ailleurs.
Mais c'est tellement facile de manipuler les gens en souffrance...