Mon petit commentaire sur cette première uvre est bien entendu subjectif, tronqué, de mauvaise foi (si vous voulez), pas érudit, lacunaire etc.
On pourra me taxer d'un manque total d'originalité. J'ai simplement essayé de dire avec mes mots à moi, pas avec ceux du Louvre ou de l'Education Nationale, respectables au demeurant, ce que je ressens.
Alors là je pourrais faire mon pédant. Vous parler de ce XVIIème siècle français que jaime tant pour ses productions architecturales, musicales, picturales et paysagères. Je pourrais glisser des allusions au Jansénisme, à Blaise Pascal (depuis le passage à leuro on la un peu oublié
!). Memento mori, Vanitas. Voilà des sujets riches à exhiber comme un prêt-à-penser culturel : du bling bling intellectuel. Parce que venant de moi, je crains que cela puisse en être. Je ne préjuge pas de ce que pourraient en dire dautres. Car ici je ne parlerai que de moi : je ne prends pas le goût des autres en otage. Donc plutôt que de vous ressortir des souvenirs de lectures mal digérées et mal comprises, je vais vous parler simplement de cette toile de Philippe de Champaigne.
Japprécie particulièrement le message de Bompi parce que jy retrouve un fort écho de ce que jessaye de défendre depuis le début dans ce fil.
Il y a tout dabord la rencontre avec la singularité dune uvre, presque comparable à la rencontre amoureuse. Souvent elle relève du hasard. Elle nest pas programmée. Elle ne sinscrit pas dans une attitude de conformisme culturel.
En clair : il est difficile de faire émerger un goût authentiquement personnel pour telle ou telle uvre, tant le poids de linstitution est fort. Je nomme « institution » avant tout le système de valeurs de légitimation et de reconnaissance des artistes et des uvres. Linstitution ne se réduit pas aux espaces du musée ou de la galerie. Je les vois plutôt comme des lieux dexercice concret de ce système de reconnaissance sur les uvres et les artistes. Linstitution cest aussi les administrations de la culture, les galeristes, les critiques, les historiens dart, le marché de lart etc.
Trop de gens parlent des uvres de manière très « sçavante » et ne font en réalité que de la redite des textes critiques. Je reste persuadé que même des thèses de doctorat sur le travail de tel artiste sont souvent des paraphrases de textes antérieurs. La critique des critiques : et en route on a oublié luvre !
Tout ça pour finalement exprimer ceci : se former un avis véritablement personnel sur une uvre est une chose longue, rare, qui nécessite du temps, de la décantation et une rencontre forte initiale.
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un petit
florilège d'une pensée qui se sent menacée par tous les discours qui ne sont pas de "soi".
dans ton commentaire sur Philippe de Champaigne, tu es toi-même pris au jeu du langage et du savoir. un autre que toi pourrait dire que ton discours est très élaboré, simplement parce qu'il n'a pas une connaissance de cette époque, qu'une "vanité" serait plus un excès d'orgueil ou d'arrogance qu'une forme de nature morte allégorique.
si tu n'avais pas étudié cette période, par affinité, tu n'aurais pas ce regard, ni cette façon de replacer ce que tu nous montres dans une perspective plus englobante.
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un commentaire n'est jamais "véritablement personnel". il est déjà investi et brouillé avant que d'être.
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ce fil est pour moi une forme de bavardage (ou comme dirait nos amis canadiens, une forme de claviardage ou bavarder avec un clavier), un espace de "conversation" qui n'est pas démonstratif mais simplement ludique et fait de rebonds et de liens...
j'aime bien cette liberté libre et un peu futile.
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ce n'est pas une rencontre avec une oeuvre d'art, mais trois anecdotes liées à un lieu, un lieu de mon enfance, qui permettra de situer (pour reprendre un de tes termes) l'endroit d'où je parle.
je dirais qu'enfant, nous allions, avec ma famille, tous les étés en "pèlerinage" à la fondation Maeght à Saint Paul de Vence. Cétaient les vacances et j'avais l'insouciance d'un garçon de 9-10 ans. on mesurait ma taille en me mettant à côté d'une des sculptures filiformes de Giacometti, on en vérifiait la progression en discutant la position du haut de ma tête sur des repères qu'on avait oubliés. tout cela était très suggestif jusqu'au jour où lon constatât que ma tête arrivait juste à la hauteur du pubis de la femme représentée. on cessa alors de me mesurer (du moins de cette façon).
la seconde anecdote concerne des toiles de Tapiès dans les grandes salles. il y avait de la terre et du sable sur les toiles. ainsi que des linges incorporés et sur une des toiles une vraie bassine en fer-blanc était comme incrustée dans la matière et la couleur. demandant pourquoi il y avait une bassine sur la toile, ma tante me répondit que c'était une façon d'introduire des objets du quotidien qui avaient une matière et une couleur (ma tante m'a confirmé tous ces souvenirs ainsi que d'autres).
la troisième, concerne Miro. j'avais remarqué que sur toutes les toiles de Miro il y avait toujours en filigrane un quadrillage au crayon. Par-dessus, les formes flottaient libres et comme mouvantes. Miro me fascinait par son côté aérien (je ne sais pas si je pouvais l'exprimer ainsi à l'époque). aussi posant la question, cette fois-çi, à mon oncle, il me répondit que Miro retranscrivait dans un format plus grand ce qu'il avait esquissé auparavant. il se servait d'un quadrillage comme report.
le peintre de la légèreté même était un mathématicien, un géomètre des formes et de l'espace.
un peu plus tard, en cours de dessin et de peinture, nous devions à partir d'une oeuvre originale en faire une autre dans le même esprit. je pris donc une toile de Miro comme modèle. on me reprocha de ne pas avoir bien compris l'exercice qui était de choisir une oeuvre d'art pour en faire une autre différente et non pas de la reproduire.
tout cela parce que j'avais mis un quadrillage au crayon sous les formes inspirées de Miro.
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j'ai grandi dans et avec les livres dans une famille où il n'était pas tabou de lire.
et j'ajouterais que j'ai lu très peu de livre sur l'art. mis à part quelques fondamentaux comme Huyghe, Faure ou Malraux.
à présent, je "lis" beaucoup de revues étrangères sur l'art contemporain comme Artforum, Frieze ou FlashArt.
mais plus pour les images que les commentaires.
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pour finir, des gens comme Maurice Blanchot ou Georges Bataille, Nietzsche et Deleuze ont formés mon esprit. il est possible alors qu'une partie d'eux-même soit devenu moi.
on appelle cela la contagion.
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les oeuvres présentées n'ont rien à voir avec la
Fondation Maeght.
uniquement avec leur auteur.
Antoni Tapiès
Joan Miro
Alberto Giacometti