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Anonyme

Invité
Que lentement passent les heures
Comme passe un enterrement

Tu pleureras l’heure où tu pleures
Qui passera trop vitement
Comme passent toutes les heures

Guillaume Apollinaire, À la Santé in Alcools.



Dans son précédent exposé, boudé par un large public en dépit d’une critique enthousiaste, le Dr. Evil tentait une forme d’éloge de la complexité en tant qu’élément constitutif incontournable du réel. Déçu par le faible écho de ce premier essai, le célèbre praticien, connu pour ses prises de positions controversées sur l’euthanasie des jeunes, revient aujourd’hui sur le devant de la scène avec un texte éclairé dont l’ambition modeste est, selon son auteur, de « sortir ces merdeux de leur indigence crasse. » Nous écoutons le Dr. Evil.


Dr. Evil — Bonjour à tous. Je vous remercie d’être venus si nombreux. C’est un jour un peu spécial pour moi. J’ai des tas de choses excitantes à vous dire ce matin.
Au cours des dernières semaines, vous avez pu découvrir les nouveaux iTextes que j’ai mis à la disposition du public : il y a eu iGermaine, iSolitude, iChiottes et, bien sûr, iToto. Vous avez d’ailleurs été très nombreux à discuter sur iChiottes, et iToto, malgré les défauts de sa première version, a été lu par bon nombre d’entre-vous, ce dont je vous remercie.

Aujourd’hui, j’ai senti que, face à l’importance grandissante des flux de communication sur le net, il fallait proposer à mes lecteurs un texte qui leur vide la tête, un truc vraiment cool, plus proche du vide intersidéral que de la « Critique de la Raison pure ». C’est pourquoi — et je suis particulièrement fier du travail accompli sur ce texte —, je vous présente iBar. iBar est un iTexte sur le presque rien. Parce que chez nous, à la Evils Corp., nous pensons que c’est le « presque » qui fait la différence. Mais je préfère vous le laisser découvrir par vous-mêmes.


iBar [Début du texte]

Et puis il y a le « bar ».

Le « bar » est un forum d’un type un peu particulier, dont le principe reste simple néanmoins : on y parle, en long, en large et surtout en travers, de tout ce dont les autres forums ne parlent pas, dans une ambiance qui, sous prétexte que l’endroit est ouvert à tous, se veut prétendument conviviale et est censée rappeler celle coutumière aux débits de boissons qu’on trouve un peu partout dans le monde réel. La singularité du lieu tient en ceci que tout un chacun peut, sous couvert de l’anonymat ordinaire et sans limitation quant au nombre de mots utilisés ou à la tonalité des propos tenus, venir y déverser le petit surplus de paroles qui n’aurait pas trouvé sa place ailleurs. Il semble qu’on y rie beaucoup, que les « clients » soient assidus, avec toutefois une tripotée de piliers de comptoir dont la plupart s’enivrent l’un l’autre, ou seuls, de leur propre prose. Le mimétisme avec le monde réel a été poussé à ce point de raffinement que le contenu même des verres est, ici comme ailleurs, bien plus savoureux que les conversations qui s’y tiennent. Le « bar » est un lieu qu’on s’accordera à trouver « branché », voire « tendance », et où il serait le plus souvent mal venu de reprocher à quiconque le mauvais usage qui pourrait être fait de la liberté de se taire.

Située, pour l’essentiel, dans une tranche d’âge de 15 à 35 ans, la clientèle de cet établissement se singularise par son goût immodéré de la prose bêtifiante et de la blague facile. On a beau dire que la paresse intellectuelle est une forme de vulgarité des plus évidentes, personne parmi les habitués, pourtant si enclins à faire étalage des manifestations de leur nonchalance naturelle, n’accepterait de se réclamer de cette paresse-là. De même, il serait vain de chercher à les convaincre de la grande médiocrité qu’il y a à aborder avec légèreté les sujets les plus spécieux. Si chacun sait que la gravité seule convient au jeu et qu’il faut mettre beaucoup de sérieux à bien rire, peu sont ceux qui semblent faire cas du plaisir de leurs voisins de table, ni même de leur propre plaisir.

Pour la plupart, les habitués se connaissent entre eux. Ils organisent de temps à autre, et sans variation quant au prétexte de ces retrouvailles, des soirées thématiques qui s’achèvent d’ordinaires dans les vapeurs d’alcools étranges dont, par la suite, la seule évocation suffit à les plonger dans une interminable nostalgie. Interminable quant au sentiment sans doute, mais aussi parce qu’ils ne peuvent réfréner, même longtemps après, l’impérieux besoin de partager leurs cuites avec la terre entière. Or, si l’alcool se partage, la cuite ne se raconte pas. Elle appartient tout entière au mystère d’une nuit et ne supporte pas la lumière du jour. Bref, à froid, comme les grands cigares, la cuite pue.

Près du comptoir, les conversations vont bon train. Parmi les nombreux sujets de discussions, rares sont ceux qui dépassent le niveau de « Mais d’où te vient donc ton surnom, Popaul ? » ou « Quelle était votre température anale ce matin ? » Il s’en trouve d’autres cependant qui donnent lieu à de grands échanges culturels sur la musique des années 90 et les livres à 10 francs. On y cause volontiers — et bruyamment — du dernier ouvrage paru au sujet des poteries précolombiennes, comme du numéro 271 de Pif Gadget, celui qui me manque pour finir la collec’.

Quand les sujets se font rares, ce qui arrive parfois, les jeux du cirque commencent. On jette un pauvre couillon au milieu de l’arène, ou on attend sagement que les lions se bouffent entre eux. Le conflit a du bon puisque, quoiqu’il en soit, il faut qu’il se passe quelque chose. Les imbéciles sont, avec l’hydrogène, ce qu’il y a de plus répandu dans l’univers et il s’en trouve toujours que le silence effraie plus que le bruit et la fureur (1). À l’image de leur mère nature, les clients du « bar » ont horreur du vide et je m’étonnerai toujours qu’ils s’efforcent de le combler avec du vent.

Pour finir ce sombre tableau, je voudrais avoir une pensée démagogique pour les jeunes cons. Je voudrais qu’ils sachent que je ne leur en veux pas de leur indigence intellectuelle manifeste et de leurs préoccupations insipides. Je ne leur en veux pas car, qu’ils le croient ou non, je fus des leurs. J’avais 17 ans, je ne me préoccupais que des jupes des filles et je n’avais d’autre ambition que d’arriver au mercredi suivant, dont l’après-midi se passerait immanquablement avec mes potes dans quelque arrière-salle de bistrot. Je me souciais fort peu alors de ce monde autour de moi dont j’entendais parler sans le connaître. Mon monde à moi, le seul vrai monde, s’arrêtait à ces mercredis embellis par le souvenir, alors que, souvent, on se faisait juste chier ensemble.

À ceux par contre qui viennent réchauffer une adolescence tardive au beau soleil de la jeunesse, ceux-là qui ne manqueront pas de stigmatiser, ouvertement ou entre eux, mon aigreur supposée ; à ceux qui me trouveront bien importun et qui, l’esprit épais, viendront beugler pour qu’on les laisse s’abrutir mollement au creux de propos fades ; à tous ceux-là, je dis : « Merde ». [Fin du texte]


Je vous remercie de m’avoir écouté et, je l’espère, entendu.

(1) Librement adapté de Mac-bête. Quel visionnaire ce Will !
 
C'est tellement vrai...même si ça fait un peu mal à entendre.
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Mon esprit, comme mes vertèbres,
Invoque ardemment le repos;
Le cœur plein de songes funèbres,

Je vais me coucher sur le dos
Et me rouler dans vos rideaux,
O rafraichissantes ténèbres.

iCiao
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Bravo pour ce "presque tout sur presque rien".
Le "Dock", c'est l'exception qui confirme la règle !
Bon, et si on déconnait maintenant ?
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barbarella a dit:
A ce moment même : SANS COMMENTAIRE

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Moi aussi, je reste sans voix, je suis bouche bée, j'arrive pas à en placer une, muet comme une carpe, j'ai rien a redire, je ferme ma gueule…
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<blockquote><font class="small">Post&eacute; &agrave; l'origine par bebert:</font><hr /> Bravo pour ce "presque tout sur presque rien".
Le "Dock", c'est l'exception qui confirme la règle !
Bon, et si on déconnait maintenant ?
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<hr /></blockquote>

C'est pas pour ça qu'on est là ?
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<blockquote><font class="small">Post&eacute; &agrave; l'origine par bebert:</font><hr />

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Moi aussi, je reste sans voix, je suis bouche bée, j'arrive pas à en placer une, muet comme une carpe, j'ai rien a redire, je ferme ma gueule…
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<hr /></blockquote>

Est-ce que pour toi c'est comme pour moi ? Tu n'as rien compris ou tu n'as pas envie de comprendre, ou il n'y a rien à comprendre.

Quel sentiment de malaise, est né en nous à la lecture de ce texte. Ce texte est-il dérangeant à cause de sa globalité, ou de ses assertions directes ?

Doc Evil est-il venus pour sauver nos âmes du purgatoire des forums, ou pour nous démontrer que nous sommes de sombres imbéciles juste bons à nous vautrer dans la fange du parler pour ne rien dire ?

These, are the questions
 
ah non ! ah non ! un suget de plus ou l'on peut déconner,ça compte,merci docevil,il n'y en a pas tellement,notre bon docteur nous a psycologisé(oui ça se dit
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) pour une fois que ça ne nous coute pas un rond.

ENCORE ! ah oui ! aaahhhhhhhh !
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<blockquote><font class="small">Post&eacute; &agrave; l'origine par barbarella:</font><hr />

Est-ce que pour toi c'est comme pour moi ? Tu n'as rien compris ou tu n'as pas envie de comprendre, ou il n'y a rien à comprendre.

Quel sentiment de malaise, est né en nous à la lecture de ce texte. Ce texte est-il dérangeant à cause de sa globalité, ou de ses assertions directes ?

Doc Evil est-il venus pour sauver nos âmes du purgatoire des forums, ou pour nous démontrer que nous sommes de sombres imbéciles juste bons à nous vautrer dans la fange du parler pour ne rien dire ?

These, are the questions
<hr /></blockquote>

Suis-je la seule à me poser des questions ?
Pourquoi ais-je l'impression de ne pas comprendre ?
Pourquoi les forums existent-ils ?
Pourquoi y a t-il un bar sur macg ?
Pourquoi les sujets les plus "intéressants" sont-ils les plus "cons" ?
Pourquoi ce midi vais-je manger des pâtes ?

Quel est le but de mon existence ?
Pourquoi vivre ?
Pourquoi mourir.....................................................................

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Surtout, ne parlons pas pour ne rien dire.
 
Ne meublons pas.
 
Sérieux, c'est vide ici.
 
Vite ! quelqu'un pour dire quelque chose d'intello, on s'abrutit ici !
 
Je citerais bien Nietzsche, Hegel ou Kant, mais j'ai jamais lu.

Et je suis pas sûr que ce soit bien dans le cadre d'un forum Mac.


"On peut parler sérieusement sans se prendre au sérieux"
Yip dans Critique de l'emmerdement pur (au sens de "on se fait chier")
 
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